À deux pas du bar, Faustine perd patience : « Bon sors de là Camille ! » Aussitôt dit, l’espèce de pantin désarticulé qui répond à son nom sort d’entre les poubelles d’un porche, le pantalon sur les chevilles et le caleçon sur les genoux : « Mais j’pas fini–. Zu–teuh. » Elle se tourne en direction de Dimitri et Quentin : « J’vous le laisse. Il m’a saoulée. » Dimitri n’a pas le temps de répliquer qu’elle se trouve déjà à la hauteur de Anna au bout de la rue. Quentin prend le relais et crie à Faustine : « T’inquiète pas. On s’en charge !
– Non non, j’vais l’faire. C’est mon pote, lance Dimitri.
– J’insiste. Va avec les filles. On vous rattrape. C’est pas la première fois que j’resappe un gars bourré. Hahaha…
– Hmm. Ok. J’aime autant rejoindre les filles que de savoir où, quand et comment.
– Hahaha. T’as raison. Allez, file.
Quentin s’aventure vers le porche et y retrouve un Camille, une main à plat contre le mur d’en face et le reste du corps qui se balance de droite à gauche les fesses à l’air.
– Allez garçon, fini de rigoler. Ta meuf est grave vénère et on est à côté du bar. Allez…
Camille se retourne sans crier gare. « Hello big boy ! J’ai pas besoin de voir ta teub garçon ! Rhabille-toi !
– Mais j’suis bourré.
– Sans déconner ! Allez hop !
– Hop !, dit-il en imitant Quentin puis il saute à pieds joints.
– Oh le spectacle ! Tu t’fous d’ma gueule ? Parce que si c’est le cas, on se connaît p’t’être pas mais j’vais m’énerver moi aussi.
– Mais euh…
– Bon et t’as fini de pisser ?
– Ou-oui.
– T’as pas envie de vomir ?
– N-non.
– Bon c’est déjà ça d’pris. Tu veux un coup d’main.
– Et oh doucement ! J’suis pas un garçon facile.
– Et il fait d’l’esprit en plus ! Joue pas au con.
Camille baisse la tête, pleine d’alcool et de mots bégayés. Quentin lui remonte le caleçon et le pantalon d’une traite. (Putain, si on m’avait dit…) Il boucle sa ceinture.
– T’es sûr qu’ça va ? Tu veux pas qu’j’t’appelle un taxi ?
– Non non… non ça ira.
– Allez viens on va marcher. Ça ne peut que te faire du bien. C’est à droite puis tout droit.
– Merci.
– On s’connait pas mais c’est à ça qu’ça sert les copains.
– Hmm… Et d-dis-moi si j’me t-trompe mais y s’passe un truc avec Dim ?
– J’en sais rien. On verra quand j’pourrai avoir un moment avec lui…
– Moi j’trouve que… que vous iriez bien tous les deux.
– C’est gentil mais c’est vraiment pas à l’ordre du jour.
– Ah ?
– Oui.
– Pourquoi ?
– On s’en fout.
– En t-tout cas, vas-y molo q-quand même. Il a morflé mon ami.
– Ça s’voit… T’en fais pas. J’suis pas un méchant.
– Han– Faustine ! Elle est pas trop…
– Mais trop mon gars !
– Oh j’suis vraiment t-trop – HUPS ! – trop con.
– Ça y est tu retrouves la raison. Bon on y est presque. J’t’offre une pinte d’eau tu vas t’régaler !
Les deux hommes marchent difficilement jusqu’au bar. Ils arrivent au niveau de la terrasse. Faustine se jette sur Camille. Elle adresse un sourire à Quentin.
– Oh merci Quentin. J’en pouvais plus. Bon et toi c’est bon, t’arrête tes simagrées ?
– Oui madame.
– Oui oh fais pas l’enfant hein ! J’retourne voir Anna et Sophie. Ça m’fait chier mais tu m’as saoulée. T’es privé d’moi jusqu’à nouvel ordre mon p’tit pote.
– Mais bébé…
Puis elle tourne les talons. Dimitri fait signe à Quentin et Camille de venir le rejoindre. Les trois hommes s’installent à une table avec un couple d’inconnus.
– Ça vous dérange pas si on se pose avec vous les gars ? demande Dimitri.
– Plus on est de fous…
– Super. Merci.
– Pas d’quoi.
– Bon Camille t’es parmi nous ?
– Oh tu vas pas me mettre une chasse toi aussi ?!
– Mais non… Tu sais qu’je t’aime comme ça.
– Eh ! C’était pas une chasse que j’t’ai mise tout à l’heure, scande Quentin. C’était pour te faire réagir.
– Je sais…
– Tu lui as remis l’caleçon et tout ? reprend Dimitri.
– Bon on commande ? ironise Quentin.
